Les objectifs de la COP 15 sur la biodiversité à Montréal sont ambitieux : protection de 30 % de la planète, restauration de 30 % des écosystèmes, réduction des risques liés aux pesticides ou encore doublement des financements pour la protection de la nature.
C’est en plein milieu de la nuit, sur les coups de trois heures du matin à l’heure québécoise, que l’accord a été adopté. Après quatre années de travail et deux semaines de négociations pendant la quinzième édition de la conférence mondiale pour la biodiversité (COP 15) à Montréal, 195 Etats se sont engagés à prendre une série de 23 objectifs pour « arrêter et inverser la perte de biodiversité » d’ici à 2030.
Parmi les points clés de l’accord « Kunming-Montréal » : protéger 30 % de la planète, en restaurer autant, réduire les risques liés aux pesticides de moitié mais aussi doubler les financements pour la protection de la nature.
Cette dernière question est, de loin, la plus problématique. Au total, 200 milliards de dollars (soit le double de ce qui est alloué à la protection de la biodiversité aujourd’hui) devront être trouvés d’ici 2030. Si la Chine, co-organisatrice de cette COP avec le Canada, est en effet passée outre le désaccord du Congo pour adopter le texte. Le pays d’Afrique centrale, Etat partie de la Convention pour la diversité biologique, a jugé que le financement n’était pas assez important.
Des flux jugés insuffisants pour les pays en voie de développement
Le Congo ainsi que plusieurs autres pays du Sud réclament des aides des pays du Nord pour préserver la biodiversité à hauteur de 100 milliards de dollars. Dans l’accord final, ce soutien se chiffre à 20 milliards de dollars par an d’ici à 2025, et 30 milliards en 2030. Et contrairement à ce que souhaitaient les pays du Sud, la gestion de ces finances se fera via le Fonds pour l’environnement mondial (FEM), déjà existant, plutôt que par la création d’un nouveau fonds dédié à la biodiversité.
Ronan Dantec, sénateur EELV de Loire-Atlantique, qui a fait le déplacement à Montréal, salue les avancées de la COP 15 qui sont un « véritable progrès », mais reste en effet circonspect sur les ambitions financières. « On est loin de donner aux pays des garanties financières qui pourraient les convaincre de ne pas répondre aux sirènes des exploitations forestières par exemple ».
Un accord-cadre qui ne promet pas une mise en œuvre aisée
Au contraire, certains financements devront être abandonnés : 500 milliards de dollars de subventions jugées néfastes pour la nature devront être éliminés, supprimées ou réformées. Particulièrement sensible, ce point touche notamment aux aides pour l’agriculture conventionnelle et risque d’être compliqué à mettre en œuvre sans volonté politique de chaque pays.
Les objectifs de 30 % d’aires protégées en 2030 ont été menés haut et fort par l’Union Européenne durant toutes les discussions. S’ils ont eu gain de cause, les 30 % sont une cible globale, et pas à l’échelle nationale. La Chine, par exemple, ne souhaitait pas devoir placer sous protection 30 % de son espace maritime.
Pour certaines associations, comme Bloom, il manque un objectif qualitatif pour la protection des espaces terrestres, maritimes et aériens. En effet, la définition de protection est large et peut aller de zones « sous cloche » à des zones où l’activité humaine est tolérée.
L’accord trouvé à Montréal a beaucoup été présenté comme l’équivalent de l’accord de Paris pour le climat, mais dans sa version « biodiversité ». S’il n’est pas contraignant, il fixe néanmoins des objectifs ambitieux qui ont le mérite de redonner de la valeur à la protection de la biodiversité et un cadre de suivi de ces objectifs.
Prendre la revanche sur les accords d’Aichi
L’accord « Kunming-Montréal » suscite beaucoup d’espoirs à l’échelle de la communauté internationale, mais tous redoutent un scénario comme celui des accords d’Aichi. Cette série d’objectifs signée au Japon en 2010 n’a pas été suivie de mesures contraignantes et est clairement considérée comme un échec.
Pour l’écologiste Ronan Dantec, les circonstances sont bien meilleures aujourd’hui qu’il y a 12 ans. « L’urgence climatique a mis la lumière sur l’importance de préserver les bassins de forêts qui sont essentiels à la captation carbone. Ça permet de faire le lien entre climat et biodiversité. »