ENTRETIEN

Moubarakou LIADI, scénariste réalisateur : « les intoxications alimentaires sont des questions actuelles et il fallait créer du contenu audiovisuel pour sensibiliser la population »

Rendez-vous incontournable de la vulgarisation scientifique, le festival international du Film Scientifique est une manifestation grand public mettant en lumière les meilleurs films scientifiques récents et des réalisations locales. Les objectifs de la manifestation sont de faire découvrir et comprendre les sciences par l’image, favoriser les rencontres entre animateurs, réalisateurs, producteurs de films, susciter des vocations. 

Pour l’édition 2021, Moubarakou LIADI, jeune producteur de film scientifique a été sélectionné pour son film sur la problématique des salmonelloses au Bénin. Au retour de ce festival qui a eu lieu à Paris, nous le recevons en entretien. Avec lui, il est question du bien-fondé de son documentaire et des grandes lignes du de la 17ième édition du festival international du Film Scientifique.

Al For Sciences Media :  Présentez-vous plus amplement à nos internautes.

Moubarakou L. : Merci de l’invitation, nous sommes très heureux de faire le point de notre participation au festival de film Pariscience avec vos internautes. Je suis Moubarakou LIADI, scénariste-réalisateur-producteur à 229 Science ; une maison de production audiovisuelle spécialisée dans la création des contenus audiovisuels à caractère scientifique.

Vous avez participé au festival international du film scientifique Pariscience. Il s’agit de quoi concrètement ?

Le festival Pariscience est un festival créé en 2005 en France par l’Association Science et Télévision. Cette année, nous étions à la 17 ème édition. Il réunit tous les passionnés de sciences et d’images, autour du meilleur de la production française et internationale du documentaire scientifique. Il est doté de plusieurs prix, dont le prix incubateur Plein Suds.

Remis par l’institut de recherche pour le développement (l’IRD), ce prix est doté d’une aide à la réalisation d’une valeur de 2.000 euro et récompense le meilleur projet de court métrage à réaliser dans l’un des pays d’implantation de l’IRD. En 2020 lors de la 16ème édition, j’ai eu la chance de décrocher ce prix incubateur avec mon projet de film Salmonella. Avec l’accompagnement  des 2.000 euro, mon équipe et moi avions donné vie à ce film de 17 minutes qui a été bien reçu au festival cette année.

Justement vous avez produit un film documentaire sur les salmonelloses. Revenez sur le bien-fondé de ce documentaire. Pourquoi les salmonelloses ? Ça pouvait être autre chose. Non ?

Je suis d’accord, ça pouvait être autre chose. Mais j’ai jugé utile d’envoyer ce dossier qui traitait de salmonellose parce qu’à mon humble avis, les intoxications alimentaires sont des questions actuelles et il fallait créer du contenu audiovisuel pour sensibiliser la population. L’idée de ce film nommé SALMONELLA m’est venue après lecture d’un article du feu Professeur Benjamin FAYOMI intitulé : TOXI-INFECTION ALIMENTAIRE EN MILIEU RURAL BENINOIS. Cet article scientifique publié en 1992 relate un évènement malheur qui s’est produit deux ans plus tôt à Djakotomey.

Une intoxication alimentaire collective ; au total 29 personnes touchées, 23 sujets vus en consultation ont présenté des troubles digestifs banaux faits de diarrhées liquides, parfois striées de sang, accompagnées de douleurs violentes, de céphalées parfois intenses et de vertiges. 5 cas ont nécessité une hospitalisation de plus de 48 heures avec perfusion, 1 cas « enseignant  de 34 ans » est décédé à domicile avant tout traitement.

De cet article j’ai su que l’information et l’éducation des populations en matière d’hygiène alimentaire méritent d’être renforcées surtout en Afrique subsaharienne car les circonstances d’intoxication identiques à celles décrites dans cet article ne sont pas rares actuellement. Leurs déclarations sont largement sous-évaluées par les autorités sanitaires.

Leurs origines sont rarement élucidées du fait de la faiblesse des moyens de diagnostic notamment bactériologiques. Bien souvent, la première cause invoquée par les responsables locaux est “l’empoisonnement” ou la sorcellerie, source de vives passions à divers niveaux de la communauté.

De 1990 à aujourd’hui, les risques des toxi-infections à la salmonelle sont toujours présents. Ce documentaire se positionne en éducateur et mets l’accent sur les probables causes de la salmonellose et les traitements alternatifs proposés par les scientifiques de l’Université d’Abomey-Calavi notamment ceux de l’Unité de recherche en Microbiologie Appliquée et Pharmacologie des substances naturelles URMAPha.

Racontez-nous les coulisses de la réalisation de ce documentaire.

Les coulisses de ce film ont été les plus fastidieuses en termes de travail, d’imprévus et d’adaptation. Pour vous dire vrai, le projet écrit sur papier n’a rien à avoir avec la réalité du terrain. Nous avions eu assez de mal avec nos intervenants, ils étaient pour la plupart occupés. Mais comme  le dit l’un de mes mentors, tout le monde est remplaçable.

Nous avions réadapté au fur et à mesure le scénario ; faire des sacrifices psychiques et financiers pour rendre ce film réel. Après finition, nous avions envoyé le film au festival, ils ont apportés des corrections constructives. Ce n’est qu’après cela, que le film a été admis pour être projeté au Festival avec 62 autres films venus du monde entier.

Moubarakou LIADI, au détour du festival scientifique à Paris, quelle est votre sensation ?  

Au détour du festival scientifique à Paris, je suis animé par une sensation de joie, de fierté, de gratitude à l’endroit de tout ceux qui ont rendu cette expérience possible. Ce n’était pas évident.

Durant mes 15 jours de séjour, j’ai eu l’immense opportunité de suivre tous les films sélectionnés, d’échanger avec la majorité des réalisateurs sur le film scientifique africain et les défis actuels à relever pour l’émergence des films documentaire scientifique d’origine africaine réaliser par les africains.

Mon séjour a été aussi une occasion pour des renforcements de capacité en pré-production et en post-production avec l’agence lookatsciences à Paris.

Il y a l’aspect réseautage qui saute à l’œil en de pareilles circonstances. Comment appréciez-vous justement cette opportunité ? Un de plus pour vous ?

Je souhaite à tout jeune de vivre l’expérience Pariscience. Ce festival m’a permis de rencontrer des gens formidables et de parler de projets africains. Ça été un plus pour moi. J’ai eu la chance de resauter avec les responsables de certaines chaines de télévisions française et européenne dans le but d’exporter, ce qui se faire de mieux sous nos cieux.

En termes de production de film scientifique, quels sont les perspectives que vous avez pour le continent et le monde scientifique ?

Nous envisageons redynamiser le secteur de la production audiovisuelle en impliquant davantage les scientifiques. Entamer co-productions avec certains partenaires qui ont donné leur accord de principe pour nous accompagner dans nos prochaines productions.

Comme vous le savez, pour une production audiovisuelle de qualité, il faut les moyens techniques et financiers. Nous allons donc maintenir le cap tout en essayant de produire à chaque fois des œuvres professionnelles diffusables dans le monde entier.

Qu’avez-vous à ajouter pour finir cet entretien ?

Je tiens sincèrement à vous remercier pour le travail que vous abattez pour la promotion de l’information scientifique au Bénin et en Afrique. Je remercie l’Unité de recherche en Microbiologie Appliquée et Pharmacologie des substances naturelle URMAPha et son chef Docteur Victorien DOUGNON pour son soutien permanent ; l’Institut de recherche pour le développement IRD pour sa confiance ; pour finir un grand merci à l’équipe de 229 Science, je veux nommer Fidel HOUNHOUEDE, Eudon HOUESSOU, Madjid LIADY, Samuel TANDJA et au conseiller scientifique Dr Boris LEGBA.

Propos recueillis par Elvis Gnacadja et Giraud Togbé

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