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Restauration des terres et sécurité mondiale : un levier  pour la stabilité

Lors de la Conférence de Munich sur la Sécurité 2025 (MSC 2025), une discussion intitulée Conversation on Land Restoration and Security, organisée par la Convention des Nations unies sur la lutte contre la désertification (UNCCD) en partenariat avec Adelphi Research, a mis en lumière un enjeu stratégique souvent sous-estimé : l’impact de la dégradation des terres sur la stabilité mondiale.

S’appuyant sur les conclusions du rapport Ground for Peace, présenté à cette occasion, les experts ont souligné la nécessité d’intégrer la restauration des terres aux politiques de sécurité pour prévenir les conflits et renforcer la résilience des sociétés face aux crises environnementales et économiques croissantes.

Dans l’ombre des conflits géopolitiques et des crises économiques, la dégradation des terres progresse à un rythme alarmant. Selon les Nations unies, 40% des terres mondiales sont déjà affectées, menaçant la sécurité alimentaire, l’eau et la biodiversité.

Son coût économique annuel est estimé à 6300 milliards de dollars, un fardeau qui pèse lourdement sur les économies les plus vulnérables. Selon le Secrétaire exécutif de l’UNCCD,  Ibrahim Thiaw : “la dégradation des terres n’est pas seulement une crise environnementale, c’est un défi sécuritaire majeur. Restaurer les terres, c’est restaurer la paix.”

Le lien entre ressources naturelles et conflits est bien documenté. Pour les spécialistes, lorsque les terres deviennent infertiles et que l’eau se fait rare, la pression sur les populations augmente, exacerbant les tensions locales et poussant des milliers de personnes à l’exode. Le rapport Ground for Peace souligne que 60 % des services écosystémiques dans les zones touchées par des conflits sont déjà dégradés.

Ce qui rend leur stabilité encore plus complexe. Pourtant, seuls 10 % des financement climatiques mondiaux sont alloués à la restauration des terres, un chiffre jugé largement insuffisant par les experts présents à Munich.

En effet, Jochen Flasbarth, Secrétaire d’État allemand du Développement a souligné la nécessité d’une coopération internationale renforcée “Il est crucial d’élever la question des terres, de la paix et de la sécurité au rang de priorité mondiale, en favorisant une coopération intégrée aux niveaux international, régional et national”,  a-t-il déclaré. 

Des initiatives qui changent la donne

Malgré l’ampleur du défi, certaines initiatives démontrent qu’un engagement collectif peut inverser la tendance. Parmi les projets mis en avant lors de la conférence il y a : 

  • le Peace Forest Initiative (PFI), porté par l’UNCCD et la Corée du Sud, qui promeut la coopération transfrontalière à travers la reforestation afin de réduire les tensions et d’améliorer la gestion des ressources partagées.
  • la Grande Muraille Verte en Afrique, un projet ambitieux visant à restaurer 100 millions d’hectares de terres dégradées dans la région du Sahel, et l’aire de conservation Kavango-Zambèze (KAZA), en Afrique australe, illustrent comment une gestion concertée des ressources naturelles peut à la fois stabiliser les conditions de vie des populations, protéger la biodiversité et réduire les tensions liées à l’accès aux terres et à l’eau.

Ces projets démontrent qu’une gestion durable peut être un instrument puissant pour renforcer la stabilité et prévenir les conflits. Mais leur succès repose sur deux éléments clés à savoir, un cadre de gouvernance efficace et des financements pérennes.

“Si nous avions investi dès le départ dans la restauration des terres, cela nous aurait coûté une fraction des ressources mobilisées aujourd’hui pour en gérer les conséquences.” souligne Abdel Bin Ahmed Al-Jubeir, ministre d’État saoudien aux Affaires étrangères. 

Un tournant décisif pour la communauté internationale

Alors que les pressions environnementales et sécuritaires s’accélèrent, la restauration des terres apparaît comme une solution incontournable pour garantir un avenir plus stable. Assurer des terres productives et accessibles ne se limite pas à une question de développement durable, c’est aussi une condition essentielle pour la paix et la prospérité des générations futures. 

Les experts réunis à la MSC 2025 ont lancé un appel clair : la restauration des terres doit être intégrée aux stratégies de sécurité nationale et internationale. La question n’est plus de savoir si nous devons agir, mais comment mobiliser rapidement les ressources nécessaires pour y parvenir.

Maïkano Nasser (Stag)

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