Parmi les enjeux cruciaux de l’humanité durant ces dernières décennies, figure en bonne place celui de l’environnement. Au regard des statistiques de moins en moins reluisantes, l’urgence d’actions pour sauvegarder et conserver la nature s’avère être une évidence, et un gage de la pérennité de l’espèce humaine.
Ainsi, les qualifications professionnelles spécifiques du domaine de l’environnement, de plus en plus croissantes, attirent les passionnés de la cause, qui ne perdent pas un instant pour s’en approcher.
Nous sommes allés à la rencontre de Mariama Djambony Badji, une jeune ingénieure génie civile, passionnée de l’environnement et entrepreneure. La CEO de DNA, une femme qui a su déchiffrer les méandres des enjeux climatiques, essaie de tirer à travers ces efforts, son épingle du jeu, dans un secteur qui en demande énormément. Entretien avec Giraud Togbé
AFos Media: Bonjour, présentez-vous !
Mariama BADJI : J’ai 24 ans et je suis ingénieure en Génie civile, une grande passionnée de l’environnement. Je fais partie des 10 jeunes sélectionnés par l’Ambassade des Nations unies pour la promotion des objectifs de développement durable. Je suis aussi entrepreneure, co-fondatrice et CEO d’une entreprise de construction qui est orientée dans la construction bioclimatique DNA.
On se rend compte que le secteur bâtiment représente à lui seul aujourd’hui 40% des émissions de gaz à effet de serre. Donc avec DNA, nous proposons des alternatives qui permettent de préserver l’environnement. C’est d’ailleurs pourquoi nous utilisons principalement la terre crue et la terre cuite pour construire pour ainsi garantir un habitat sain et surtout préserver l’environnement.
Nous sommes sur un chantier à Sangalkam actuellement et vous travaillez sur ce chantier
C’est une cité où tout est presque en désordre mais vous verrez de loin que la maison en terre cuite se distingue de par sa couleur. Puisqu’on a déjà l’habitude de voir des briques, du ciment, des bétons. Mais ici, nous sommes en train de construire un R+1 avec de la terre cuite. C’est l’œuvre de DNA Design engineering architecture.
Parlez-nous de cette entreprise. Depuis combien d’années existez- vous ici ?
DNA est une entreprise de bâtiment et de travaux publics fondée sur l’engagement pour le bien de la communauté et la passion pour l’innovation. Notre vision c’est d’être des acteurs du développement durable en Afrique. Cela passe par des missions comme concevoir des cadres de vie qui sont respectueux de l’environnement et surtout propices à l’épanouissement de tous.
DNA a été créée formellement en 2019. Et nous avions déjà commencé à travailler depuis 2018 parce que tout est parti d’un projet de co-développement. Ils avaient exigé que nous étudiants à l’époque, fassions le suivi des travaux. Donc DNA est partie de là, puisque c’est resté avec l’association AFRICA FELIX SENEGAL. Et comme vous le savez au Sénégal, les salles de classe sont pléthoriques, nous sommes partis équipés une salle informatique.
Du coup, il y a des fondations qu’ils avaient commencé et n’avaient pas les moyens pour terminer. Nous étions en deuxième année à l’époque à l’école supérieure polytechnique de Dakar et on nous a ainsi demandé ce que nous pouvons faire. Nous avons donc fait toute l’étude technique et financé le nécessaire en montant le dossier.
Ensuite, nous avons demandé un financement qui nous a été accordé. Au lieu de deux salles de classe sur quatre salles de classe, le bailleur a exigé à ce que nous fassions vraiment le suivi des travaux. Et donc c’était l’occasion idéale pour nous lancer, car nous voulions tous avoir notre propre entreprise, mon cofondateur et moi, à la fin de nos études.
Mais on s’est dit pourquoi ne pas commencer maintenant avec le peu d’expérience et continuer après l’obtention de notre diplôme d’ingénieur. Néanmoins, ce n’est qu’en 2020, lorsqu’il y a eu la COVID que les cours se faisaient en ligne qu’on a eu beaucoup de temps pour commencer les travaux.
Mariama D. Badji
Vous êtes ingénieure en Génie civile, c’est quoi la construction écologique selon vous ?
La construction écologique ou bioclimatique est une construction qui s’inscrit dans son environnement et donc il n’y a pas de définition exacte. Mais, c’est plutôt un ensemble de principes qui permet de parler de construction bioclimatique. Ça prend en compte l’utilisation des matériaux et ça commence déjà par la conception. C’est-à-dire qu’il faut bien réfléchir sur le bâtiment que nous allons construire, tout en prenant compte de l’éclairage naturel pour éviter d’allumer des lampes en journée.
Ceci nous permet ainsi d’économiser de l’énergie. Il nous faut également prendre en compte la circulation de l’air pour avoir une climatisation naturelle. Après tout ceci, le choix des matériaux intervient et nous proposons à nos clients de construire en terre cuite ou crue. Ces deux options sont des alternatives qui permettent de préserver l’environnement, de réduire les émissions de gaz à effet de serre du secteur de bâtiment et surtout d’assurer le confort aux occupants.
En tant que femme dans ce domaine comme celui-ci, qu’est-ce que ça fait ?
Je dirai c’est un challenge, parce que je suis une femme dans un milieu d’homme. Même si on ne le dit pas, il y a des regards sur nous. Tu mets ta casquette et tes bottes et les gens disent que tu peux choisir un métier de bureau ou assumer ta féminité. Mais moi je me dis qu’être femme n’empêche pas de poursuivre nos rêves et surtout de l’assumer. Moi en tout cas, je suis bien entourée par des hommes qui me font sentir à l’aise.
Ici nous sommes dans un bâtiment qui a été construit en terre crue. La différence entre une terre cuite et une terre crue est que les briques en terre cuite sont dans des fours élevés à une température 1002°C. D’aucuns disent que la brique de terre crue est plus écologique, parce qu’elle ne demande pas vraiment d’énergie ; non seulement il n’y a pas de cuisson. Donc c’est une brique qui est vraiment naturelle. Parlant de ses avantages, c’est une brique qui favorise la climatisation naturelle.
Quand bien-même il fait chaud à l’extérieur, on a un microclimat qui permet d’avoir un confort qui est nécessaire pour les occupants. C’est comme les canaris d’avant où on avait de l’eau fraiche, parce que c’était de l’agile. C’est le même principe ici. On a également joué sur l’architecture. Comme je vous l’avais dit tout à l’heure, quand on parle de construction bioclimatique, ça commence avec la conception.
Mariama D. Badji
On a donc joué sur l’emplacement des portes, des fenêtres pour avoir de l’éclairage naturel, de la circulation de l’air. Ceci nous permet d’avoir non seulement de l’air et de la lumière mais aussi, permet de jeter un coup d’œil dehors pour les formations qui se tiennent dans ces locaux d’Africa Felix.